La Loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi du 21 décembre 2022 instaure un cas de « démission présumée » du salarié qui abandonne son poste :
« Le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, dans le délai fixé par l’employeur, est présumé avoir démissionné à l’expiration de ce délai. »
Cette procédure a été imaginée et présentée comme contraignante pour l’employeur. Le point a été affirmé devant le Sénat (séance du 17 novembre 2022) et devant le Conseil constitutionnel.
La position du gouvernement est simple : « en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu lever l’obligation pour les employeurs confrontés à une situation d’abandon de poste de mettre en oeuvre la procédure de licenciement pour motif personnel, en lui substituant la procédure définie à l’article L. 1237-1-1, qui doit être mise en oeuvre à l’exclusion de toute autre procédure, notamment la procédure de licenciement. »
En conséquence, lorsque les conditions sont réunies, l’employeur n’aura pas le choix que d’appliquer cette procédure. La DSN devrait d’ailleurs intégrer ce motif afin qu’il puisse figurer sur l’attestation Pôle emploi.
Le Conseil constitutionnel a toutefois prévu des exceptions à la mise en oeuvre de la procédure de démission présumée :
- Raisons médicales ;
- Exercice du droit de grève ou du droit de retrait ;
- Refus du salarié d’exécuter une instruction contraire à la réglementation ;
- Refus d’une modification unilatérale d’un élément essentiel du contrat de travail.
De façon générale, lorsque des éléments laissent supposer que l’absence injustifiée du salariée n’est pas volontaire, ou qu’elle est, au moins en partie, due à un manquement de l’employeur à ses obligations, la procédure de l’article L. 1237-1-1 nous semble devoir être écartée. Dans ces hypothèses, il est préférable d’avoir recours à la procédure classique de rupture du contrat, pour absence injustifiée le cas échéant.
Et en cas de contestation par le salarié ?
Le salarié pourra renverser la présomption de démission en apportant la preuve que l’abandon de poste reposait en réalité sur un motif légitime (motifs de santé ou de sécurité, faute de l’employeur). S’agissant d’un contentieux relatif à la rupture du contrat, il aura 12 mois pour saisir le conseil de prud’hommes. Soit la démission est confirmée par le juge prud’homal, soit la présomption est renversée et il est à craindre que les juges s’orienteront vers le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le texte ne renseigne pas sur l’application ou non d’une période de préavis au salarié comme pour toute démission.
Dans l’attente du décret d’application, il convient donc de considérer que l’expiration du délai fixé imparti au salarié pour reprendre son travail fixe le point de départ de son préavis de démission.
La mise en oeuvre de cette procédure suppose la publication de décrets d’application qui devraient nous apporter des précisions sur :
- Le délai minimum devant être donné par l’employeur au salarié absent pour justifier son absence ;
- Les « modalités d’application » de la procédure.
Nous vous tiendrons informés dès publication de ces décrets.